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« Entre 62 000 et 65 000 ha de cultures touchés »

Début avril, le gel a frappé durement en Auvergne Rhône-Alpes, particulièrement dans la nuit du 7 ou 8. Un mois plus tard, où en est l’évaluation des dégâts pour les cultures touchées ? Quand les agriculteurs vont-ils percevoir les premières aides exceptionnelles qui ont été annoncées ? Le point avec Gilbert Guignand, président de la Chambre régionale d’agriculture.

© AADR

Connait-on précisément l’ampleur des dégâts du gel de début avril en Auvergne Rhône-Alpes ?

G.G : « La quasi-totalité des départements d’Auvergne Rhône-Alpes a été impactée par cet épisode de gel et nous estimons qu’entre 62 et 65 000 ha de cultures ont été touchés. Les chambres d’agriculture, le syndicalisme et les DDT poursuivent les évaluations sur le terrain et celles-ci sont complexes. Si l’on compare avec l’évaluation d’une sécheresse sur herbe, dans le cas du gel du mois d’avril et du fait des filières qui ont été touchées, la viticulture, l’arboriculture, avec les fruits à noyau et les fruits à pépins, les barèmes sont plus élevés et nous avons donc besoin d’une analyse beaucoup plus fine. Nous préférons ne pas nous précipiter et bien étudier les situations à fond. Car d’autres filières seront également à prendre en
compte : les grandes cultures, le maraîchage... Le prochain comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) ne va pas se réunir avant le mois de juin, nous avons encore quelques semaines pour affiner nos expertises. »

 

Quel est aujourd’hui l’état d’esprit des agriculteurs directement concernés ?

G.G : « Globalement, ils sont inquiets. Des promesses d’aides ont été faites et ils attendent maintenant qu’elles soient mises en œuvre. Certains ont perdu énormément, voire tout perdu. Les agriculteurs manquent de réponses concrètes. Sur le front de l’emploi, par exemple : les employeurs vont avoir besoin de main-d’œuvre pour nettoyer les cultures gelées, mais comment payer les salariés quand vous savez que vous n’aurez pas de récolte ? Il y a beaucoup d’inquiétude chez les viticulteurs et les arboriculteurs. C’est pourquoi nous avons tout de suite demandé que les caisses MSA soient vite mobilisées sur le volet social et l’écoute des agriculteurs en détresse. Au niveau des chambres d’agriculture départementales, des numéros verts ont été mis en place pour que les exploitants puissent appeler et être renseignés sur les démarches à suivre. »

 

Le 17 avril, le Premier ministre a annoncé des aides exceptionnelles d’un milliard d’euros. De combien la région peut-elle espérer bénéficier ? Comment ces aides vont-elles être déployées ?

G.G : « Nous espérons récupérer au moins 150 M€, car nous sommes la région la plus concernée. Les pertes en Auvergne Rhône-Alpes pourraient quand même atteindre 300 à 400 M€ ! Nous avons des points réguliers avec la Draaf1 sur la mise en place des aides, mais il est difficile d’avancer au niveau régional tant que nous ne connaissons pas précisément les mesures nationales. Sur l’emploi notamment, nous n’avons pas de réponses très concrètes. Nous demandons que les aides Covid puissent aussi bénéficier aux agriculteurs. L’urgence est de parvenir à trouver une multitude d’aides pour compenser l’ensemble des pertes. Les exploitations impactées vont être obligées d’attendre près de 18 mois avant de pouvoir de nouveau récolter des fruits ou du raisin. Les agriculteurs sont surtout dans l’attente d’argent sonnant et
trébuchant ! »

Une enveloppe d’urgence doit être mobilisée très rapidement, à la demande des préfets. Quel sera le montant pour notre région et à qui sera-t-elle destinée ?

G.G : « L’enveloppe d’urgence nationale s’élève à 20 millions d’euros (M€), a-t-on appris, sur lesquels 2,5 M€ seront destinés à Auvergne Rhône-Alpes. Cette enveloppe doit répondre aux besoins immédiats de trésorerie. Elle va être destinée en priorité aux jeunes agriculteurs et aux agriculteurs qui ont été sinistrés plusieurs fois. C’est de l’argent frais, que j’espère voir arriver chez les bénéficiaires avant le 15 juin. »

La Région a annoncé un dispositif d’aides pour les agriculteurs sinistrés (lire ci-contre).
Qu’en pensez-vous ?

G.G : « La Région veut débloquer
15 M€ pour près de 10 000 exploitations touchées ? C’est généreux mais ce ne sera pas suffisant ! J’insiste : il faut d’abord que ce soit l’Etat qui intervienne et la Région fera ensuite ce qu’elle pourra. Cela ne signifie pas que nous n’en aurons pas besoin, au contraire. Les pertes indemnisées par le fonds des calamités seront plafonnées à 40 % : il restera encore 60 % à compenser ! »

Des aides d’urgence rapides dès la fin de l’été

Le président de la Région Auvergne Rhône-Alpes a réuni la profession en visioconférence lundi 3 mai pour présenter le dispositif d’aides régionales aux agriculteurs touchés par le gel d’avril. Laurent Wauquiez veut aller vite et attend les zonages pour avancer.

 

Insistant lundi 3 mai sur la complexité, et technique, et administrative pour avancer sur les aides aux sinistrés, le président de la chambre régionale d’agriculture, Gilbert Guignand, a tout d’abord demandé à l’exécutif régional de la simplicité. « Il faut penser aux entreprises, aux jeunes qui s’installent et à toutes ces exploitations qui ont tout perdu », a pour sa part déclaré Gilbert Chavas, arboriculteur et président du comité stratégique fruits Aura. « Il y a les exploitations mais aussi toutes les structures qui font tourner la filière, la R&D, les outils de mise en marché… », a également rappelé Régis Aubenas, arboriculteur et responsable fruits à la FDSEA de la Drôme. Si le constat final des pertes réelles ne pourra se faire qu’au moment de la vendange, « le vignoble d’Aura est extrêmement touché. Le deuxième temps sera difficile, avec des pertes de fonds, de marché et, par voie de conséquence, de trésorerie », a alerté Ludovic Walbaum, pour le comité régional vin.

 

Le message général a été entendu par le président de la Région, Laurent Wauquiez. « Auvergne Rhône-Alpes doit être traitée au premier plan car elle est la plus touchée. Il y a beaucoup d’outils : nous devons être vigilants à ce que les aides [nationales] pour la région atteignent au moins
10 % » des montants annoncés, a-t-il déclaré lundi soir, espérant ainsi récupérer « entre 70 et 150 M€ ». Rappelant la situation de « fermeture administrative » vécue par les agriculteurs, ceux-ci doivent bénéficier de « prises en charge de même nature que ceux qui sont impactés par le Covid », a-t-il également demandé.

 

Obtenir les zonages « rapidement »

Sur le front des aides nationales justement, le président de la Région Aura a présenté son « plan de bataille ». D’abord, les montants : « un milliard d’euros c’est bien », a-t-il dit, mais il veut s’assurer qu’il ne s’agit pas d’effet d’annonce. Deux, les délais : M. Wauquiez a insisté sur la lenteur des indemnisations du fonds des calamités qui risque de peser dans les trésoreries. Trois,
les zonages : « ils sont fondamentaux pour me permettre d’avancer ! Pour certaines productions, on peut avoir les zonages très vite : fruits à noyaux, poires, viticulture en partie ». Quatre, la simplicité des mesures : « je pense aux exonérations ou suppressions de charges qui pourraient permettre d’avancer très vite et d’être couplées avec des aides d’urgence ». Dernière priorité : le relèvement du plafond des aides de minimis (20 000 € pour les agriculteurs) à 100 000 €, « sinon aucune chance pour que la Région puisse faire passer ses aides », a-t-il prévenu.

 

Des aides régionales dès la fin août

Sur le front des aides régionales, Laurent Wauquiez veut débloquer 50 M€, a-t-il confirmé lundi, dont 15 M€ de la Région, le complément étant attendu des Départements et des Communautés de communes. « L’objectif est de créer un fonds pour intervenir très vite et que les demandes puissent ne faire l’objet que d’un seul dossier », a-t-il décrit. Le but est de soutenir les agriculteurs les plus touchés « au-delà d’un taux élevé de pertes » et que ces derniers puissent « très vite regarnir leur trésorerie », les premiers versements étant attendus dès la fin août. Les aides régionales doivent aussi répondre à des situations de détresse et de sinistralité « très spécifiques », a insisté le président d’Aura. Ce dernier a également parlé d’« accompagnement sur la durée » pour les entreprises : structures de commercialisation, coopératives, caves. Laurent Wauquiez a également rappelé qu’il souhaiterait mettre en place un fonds assurantiel régional, en plus du fonds national qu’il appelle de ses vœux, pour aider les agriculteurs à s’assurer. Enfin, le président d’Aura veut continuer d’aider les exploitations à investir pour leur protection et leur adaptation face aux aléas climatiques.


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