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Les scolytes auront-ils raison des épicéas ?

Le massif forestier s’étend sur plus de 2000 hectares et voit ses plantations d’épicéas dévastés par les scolytes. Des coupes sont programmées pour limiter la propagation.

© ONF

Placés sous surveillance depuis l’année dernière, les épicéas de la forêt des Colettes sont sous la menace d’un petit coléoptère de 5mm de long : le scolyte. Plusieurs foyers ont été identifiés par les forestiers de l’ONF. L’hiver peu rigoureux a contribué à multiplier le nombre de ces insectes nuisibles et plusieurs foyers ont été identifiés. Des coupes sont programmées d’ici fin mai afin de sécuriser le parc

« Accro Sioule » avant sa réouverture et éviter la contagion aux parties encore épargnées. Le 11 mai la stratégie de l’ONF a été présentée aux associations et élus locaux.

 

Des coupes urgentes afin d’éviter la prolifération de l’insecte avant l’arrivée de températures plus douces

Des premières attaques avaient conduit l’an dernier à faire une première coupe sanitaire, mais  l’évolution s’est avérée être rapide : détection d’un deuxième foyer à l’automne, puis d’un troisième en fin d’année, avec à chaque fois une évolution très rapide des mortalités des  épicéas. Le parc
« Accro Sioule » se trouve maintenant dans l’impossibilité d’ouvrir sans une mise en sécurité. La parcelle adjacente est aussi infestée.

Le printemps est la saison des envols. Pour cela il suffit de trois jours à 18 degrés, une absence de vent et de pluie pour favoriser les envols des insectes et ces derniers peuvent se déplacer jusqu’à 4 km en une journée. L’observation d’arbres encore verts ne veut donc pas dire pour autant que les pontes n’aient pas déjà eu lieu. Sans interventions rapides, l’apparition de multiples petits foyers est à craindre.

 

Préserver l’ambiance forestière quand c’est possible

Les coupes à venir visent à essayer de contenir les attaques et de les circonscrire. Les autres essences seront conservées afin de garder au maximum un environnement forestier et d’ensemencer naturellement les vides créés. Le peuplement limitrophe au parc « Accro
Sioule », étant composé en grande partie d’épicéas, cette intervention aura un fort impact visuel. La partie Ouest sera coupée, car constituée de sujets déjà âgés et dans laquelle se trouvent de multiples foyers. Mais afin de limiter au maximum l’impact sur le paysage, seul un cordon sanitaire d’environ 200m sur la partie Est de la parcelle, en bordure de la route départementale sera coupé. Au-delà, les arbres seront mis sous observation pour pouvoir intervenir rapidement si  les dégâts devaient reprendre. Le risque en effet serait que les scolytes parviennent à passer de l’autre côté du massif et attaquer les forêts communales de Nades ou Echassières.

Une réunion pour présenter la situation s’est tenue avec le gérant du parc, le technicien et le directeur des services de la communauté de communes, ainsi que l’élu en charge du tourisme. Une autre est programmée dans le mois de mai pour présenter la stratégie mise en place aux usagers et communes riveraines.

Des premiers effets d
es évolutions du climat

La présence du scolyte est courante dans la vie d’une forêt. En général, une grande partie des insectes meurt au stade larvaire avec le froid et la pluie. Les évolutions du climat, avec des hivers plus doux en plaine, ne permettent plus cette régulation et on assiste à une explosion  des attaques. Partout en France, les forestiers observent également des mortalités exceptionnelles de hêtres adultes ou de vieux chênes, c’est le cas à Tronçais, dans l’Allier par exemple. Les forestiers de la forêt des Colettes sont donc très attentifs à l’évolution de ces  peuplements. Le hêtre, essence des climats océaniques ou montagnards, ne rencontre plus ces conditions dans l’Allier. La crainte des forestiers est qu’il ne parvienne pas à s’adapter aux nouvelles données climatiques, et régresse peu à peu.

Des résineux plantés suite

à l’exploitation des carrières

La forêt des Colettes est connue pour son passé minier (kaolin et granit) qui employa près de 300 personnes jusqu’au début des années 60. L’essentiel des résineux boise le sommet du massif sur des surfaces plantées à la fin des concessions minières pour reconstituer le paysage forestier. L’épicéa à cette époque paraissait le plus efficace pour effacer rapidement les cicatrices laissées par l’exploitation des carrières. Sa présence est limitée, il ne couvre que 49 des 2050 hectares de la forêt. L’épicéa connaît partout en France des difficultés en basse altitude; c’est un des premiers effets des évolutions climatiques. La forêt des Colettes abrite des peuplements variés dont des chênes qui occupent 45% de sa surface et des hêtres sur 33%.

Un chantier dangereux

pour le public

L’accès au chantier est limité aux professionnels afin de permettre aux opérations de se dérouler en toute sécurité. L’ONF attire par ailleurs l’attention sur le respect des panneaux de signalisation des chantiers

Pierre Beltrando, responsable de l’Unité territoriale Sud Allier, secteur courant depuis Montmarault jusqu’à la limite avec la Loire.

«  Il faut éliminer le plus d’arbres malades »
Les scolytes menacent les épicéas de la forêt domaniale des Colettes, qui s’étend au sud du département de l’Allier. l’ONF, gérant le massif, essai de trouver des solutions pour limiter la propagation de l’insecte.

Outre la coupe des arbres infectés, y a-t-il d’autres solutions de lutte contre ces insectes ?
Au niveau d’une forêt, il n’y a généralement pas de lutte active et ce pour plusieurs raisons : tout d’abord économiques, car le coût d’un traitement multiplié par le nombre d’individus, la fréquence de traitement et la durée de vie d’un peuplement serait prohibitif, pour des raisons écologiques également, car nous comptons sur l’équilibre s’opérant entre les différents acteurs, les parasites et leurs prédateurs par exemple. Lorsqu’une espèce n’est plus en équilibre avec son milieu, elle est appelée à être remplacée par une autre.

Que deviennent les arbres coupés ?

Ont-ils tout de même une

valeur marchande ?

Les arbres exploités vont être dirigés vers des industries utilisatrices en fonction de leur grosseur et de leur qualité : de la charpente ou de la palette pour les bois sains et de bonnes dimensions, de la trituration ou de la plaquette pour les petits bois ou les bois secs. Tous n’ont pas la même valeur marchande, et les dépérissements font chuter très fortement la valeur des bois.

La forêt des Colettes est composée, pour une partie de sa surface, d’épicéas. Des résineux qui ont été implantés un peu partout sur le territoire français à des altitudes beaucoup plus basses que celles auxquelles ces espèces ont l’habitude d’évoluer. Les aléas climatiques évoluant rapidement, provoquant des effets directs et irrémédiables sur ces peuplements forestiers, est-ce que ces implantations peuvent-elles être désormais considérées comme de véritables erreurs ?

Les épicéas ont été implantés à une certaine époque, avec les demandes et les connaissances que l’on avait à ce moment-là. Au sortir de la seconde guerre, la France avait un besoin très important de bois pour véritablement se reconstruire. Durant les trente glorieuses, les besoins économiques étaient également très importants. L’épicéa commun répondait ainsi parfaitement aux besoins de la société : c’était une essence s’adaptant à des contextes très variés, poussant rapidement, et donnant un bois de dimension et de qualité homogènes. L’histoire nous apprend qu’il est capital de prendre en compte l’environnement dans sa globalité, mais aussi d’éviter les peuplements trop monospécifiques.

Peut-on dire aujourd’hui que nous nous dirigeons vers une importante transformation de physionomie des massifs forestiers français ?

Il est difficile de dire aujourd’hui quelle va être la physionomie des forêts de demain : nos connaissances sur l’évolution des climats, mais aussi sur la résilience des forêts sont encore très fragmentaires. Pour autant, nous ne devons pas rester attentistes, et devons essayer de tirer parti des enseignements que nous apportent les événements actuels. Nous visons à avoir, à partir des forêts que nous avons actuellement, des peuplements plus morcelés, plus diversifiés. Nous parlons de forêt mosaïque. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, car nous ne faisons qu’accompagner la nature et devons prendre en compte les peuplements existants. Dans cette démarche d’accompagnement et d’anticipation, nous allons également mettre en place des ilots d’avenir qui sont, sur des surfaces réduites (environ 2 hectares), des implantations expérimentales de nouvelles essences, indigènes ou non, mais venant de régions plus méridionales. Ce pour voir quelle serait leur adaptation, leur capacité de mélange avec les essences autochtones ; car la vitesse des évolutions climatiques peut laisser craindre des dépérissements qui se répètent et s’amplifient.

Quelle est la situation, plus particulièrement, dans les forêts du centre
de la France ?

Nous avons connu trois années de sécheresse plus particulièrement marquées, combinées à des températures estivales plus élevées. Les arbres ont utilisé leurs capacités de résistance les premières années, mais se sont peu à peu affaiblis, et nous avons connu des dépérissements plus particulièrement marqués à partir de l’an dernier. Ces conditions climatiques ont également favorisé les parasites comme le scolyte, dont les populations ont explosé et entrainé des dépérissements très rapides et très importants sur les épicéas.

Les dépérissements sont plus particulièrement sensibles dans le département de l’Allier, et touchent en particulier les chênaies

L’ONF travaille t-il sur des projets d’implantations d’espèces plus résistantes, plus adaptées quant à ces évolutions climatiques ? Que vont devenir les parcelles d
éboisées ?

Les essais de nouvelles essences ont pour vocation de rester des expérimentations et ne wwsont pas amenées à être généralisées à court terme. Il est nécessaire d’avoir le temps du retour d’expérience, ce qui, en forêt, se fait sur quelques années. Sur les parcelles que nous serions amenés à renouveler par anticipation, nous allons essayer de travailler pour une part avec les semis naturels que nous pourrons avoir, et pour une autre part en plantant et en gardant une part de mélange. La régénération naturelle permet de garder plus facilement une ambiance forestière. Dans une certaine mesure, elle peut permettre de voir émerger des individus plus résistants car ayant poussé depuis leur début dans des conditions plus difficiles. Mais elle ne sera pas suffisante, et dans certains cas, il faudra reboiser.





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